Fantasma

A Stockholm, vous êtes des milliers de femmes célibataires, indépendantes, menant votre vie, votre carrière, sans homme à l’horizon. Et quand sonne l’heure d’assurer votre descendance, et que des rides sillonnent votre front, vous commencez à vous inquiéter. Allez-vous rencontrer celui qui partagera votre vie et vous fera des enfants ?



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Entre copines, vous sortez tard le soir, dans les bars, vous fumez des cigarettes au menthol et vous buvez de la bière, de l’aquavit, de la vodka. Vous vous rendez pour la première fois au club Fantasma. Tous les danseurs sont des hommes. Ils offrent le spectacle de leur corps en cabine individuelle. Vous visitez au moins trois cabines, avant de faire votre choix. La troisième est animée par Eros, un danseur latino-américain. Cet homme, vous le reconnaissez d’emblée : vous l’avez fréquenté il y a des années, quand vous n’aviez pas encore de voiture de société ni d’ordinateur portable. Vous en étiez amourachée, mais il ne semblait vouloir se lier à quiconque. Cela fait cinq minutes qu’il danse, en se déshabillant, qu’il évolue autour d’une barre de métal verticale, et vous ne pouvez détacher vos yeux ni de son visage, ni de son corps bronzé. Il porte une cicatrice autour de la taille, comme s’il avait été enchaîné. Vous ne l’aviez jamais remarqué, à l’époque où vous vous fréquentiez. La vodka vous donne la nausée et vos copines vous raccompagnent, dans votre loft.


Le lendemain soir, vous revenez voir Eros au Fantasma, il ne sait pas que vous êtes là, derrière la vitre sans teint et que vous pleurez. Pourquoi vos larmes ne s’arrêtent-elles pas de couler ? Pourquoi, soudain, sous l’excitation du corps offert, fesses à l’air, jambes écartées, votre mémoire se ravive-t-elle et vous renvoie l’idée de l’impossibilité d’aimer cet homme-là ? Qu’avait-il de si particulier ? Vous venez de le découvrir : il a deux sexes entre les jambes, l’un féminin, l’autre masculin.


Lundi midi, au bureau, vous acceptez l’invitation à déjeuner de votre directeur financier (le seul de la société qui ait un poste supérieur au vôtre). Il vous a toujours fait la cour, mais vous trouviez cela un peu vulgaire. Aujourd’hui, vous avez l’intention de vous laisser faire.

 

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